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Ça y est… Enfin, après des mois de tergiversation, le texte visant à « renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale » a été définitivement adopté par l’Assemblée nationale ce jeudi 7 novembre 🧑⚖️.
👉 Vous trouverez en fin d’article une fiche récapitulative de l’ensemble des conséquences pour nos meublés de tourisme, ainsi que pour nos chambres d’hôtes 🏡.
Il est donc question de :
- Déclaration soumise à enregistrement
- Diminution de l’abattement qui passe de 50 % à 30 % avec un plafond de 15 000 € de loyers pour les meublés non classés
- Diminution de l’abattement qui passe de 71 % à 50 % avec un plafond de 77 000 € de loyers pour les meublés classés et pour les chambres d’hôtes
- Plafonnement possible à 90 jours au lieu de 120 jours de la location de la résidence principale sur sa commune
- Mise en place potentielle de quotas de meublés de tourisme
- Délimitation possible du PLU des secteurs réservés à la construction de résidences principales
- Diagnostic de performance énergétique classé D à partir de 2034 hors résidence principale
Je préfère alors m’attarder sur mon ressenti et mon analyse des conséquences de ce vote que je souhaite partager avec vous en toute transparence. Les mots qui vont suivre sont donc purement personnels, mais je me devais de vous transmettre mon sentiment contrasté afin de réguler ces types d’hébergement.
Loi Airbnb : une nécessité
Vous le savez, j’évolue dans ce secteur depuis plus de 20 ans depuis l’ouverture de la chambre d’hôtes maternelle « À l’Ombre Bleue » et la création de ma société « Guest & Strategy » spécialisée dans l’accompagnement de ce type d’acteurs que j’ai fondée en 2010.
Je vous confirme qu’une régularisation était nécessaire. Le constat que je fais sur le terrain est sans appel, la concurrence est aujourd’hui bien trop forte et déséquilibrée entre l’ensemble des acteurs de l’hébergement marchand pour une demande fluctuante et nullement illimitée.
Si je cite le député PS Enaki ECHANIZ, l’un des co-auteurs de la loi, le nombre de meublés de tourisme est passé de 300 000 à 1,2 million en 8 ans. Nous assistons donc à une sorte de bulle qui ne semblait pas avoir de fin et qui avait comme conséquence de déséquilibrer le marché du tourisme avant même de déséquilibrer celui évoqué du logement…
Le positif dans cette réforme est clairement la distinction d’un abattement plus favorable aux meublés classés qu’aux meublés non classés comme s’en réjouit ADN Tourisme par l’intermédiaire de son président Stéphane VILLAIN, je cite : « Conserver une différenciation dans l’abattement fiscal pour les meublés classés est une incitation forte pour les propriétaires à s’inscrire durablement dans une démarche de qualité ».
Pour le reste, voici mon analyse…
S’attaque-t-on à la bonne cible ?
Tout d’abord, ce texte fragilisera les « petits propriétaires » qui exploitent un meublé de tourisme pour constituer une complémentarité de revenus et sauvegarder un patrimoine. Vont-ils réduire leur activité avec le nombre de jours d’ouverture de leur meublé, le transformer en locatif longue durée ou encore le vendre comme l’espère le gouvernement… ? Rien n’est moins sûr, mais ils subiront clairement une forte hausse de leur fiscalité qu’il s’agisse d’impôt ou de prélèvements sociaux sans nécessairement chercher à passer au réel voire de recourir à un expert-comptable ce qui impliquerait une lourdeur administrative et des frais supplémentaires de gestion 😲.
Pendant ce temps-là, les gros acteurs qui opèrent sous un régime de société avec une logique spéculative d’investissement peuvent se féliciter de cette réforme, car ils ne seront que très peu impactés 🤨.
Que dire de l’abaissement potentiel du nombre de nuits à louer à 90 jours au lieu de 120 sur la seule location de la résidence principale ! Quelle est la logique et quel sera l’effet tandis que la majorité des loueurs de meublés de tourisme exploitent leur résidence secondaire et non principale ?
Enfin, on oublie trop vite le poids des meublés de tourisme dans l’économie touristique. Ce mode d’hébergement plait en répondant aux attentes croissantes des voyageurs qu’ils soient professionnels ou d’agrément autour d’une recherche d’indépendance, d’autonomie et d’un bon rapport qualité/prix. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le PDG de Booking.com M. Glenn FOGEL : « Nos données montrent qu’une partie de nos réservations débarquant sur notre plateforme s’intéressant à un hôtel finiront plutôt par réserver un hébergement alternatif et vice versa » (source : PhocusWire.com).
Pourquoi taper sur les chambres d’hôtes ?
Il faut là encore m’expliquer la logique… Comme j’avais déjà pu l’exprimer, notamment à travers cet article rédigé pour etourisme.info : « Le renouveau inévitable (et vital) de la chambre d’hôtes », il s’agit déjà d’un type d’hébergement menacé bien qu’il réponde toujours à certains segments de clientèles notamment là où les hôtels ne peuvent plus opérer faute de rentabilité.
Chercher à régler la crise du logement en abaissant l’abattement de 71 % à 50 % avec un plafond de 77 000 € de revenus tandis que l’extrême majorité des chambres d’hôtes opèrent au sein de leur résidence principale, personnellement, je ne comprends pas…
De surcroît, nous ne recensons d’après nos partenaires d’Accueillir Magazine que 21 500 établissements de chambres d’hôtes début 2023 contre plus d’1 million de meublés de tourisme à l’heure où je vous écris ces lignes 😵.
La conséquence sera donc d’accroître l’impôt ou les prélèvements sociaux, mais surtout une crainte de fermeture de ce type de structure d’accueil emblématique de notre pays, ce qui serait finalement bien plus défavorable pour les caisses de l’État.
Je ne décolère pas surtout qu’il n’en avait pas été question avant la Commission Mixte Paritaire du 28 octobre…
Je vous partage un courriel que j’ai reçu de la part d’un porteur de projet de chambre d’hôtes que nous accompagnons qui cristallise mes inquiétudes : « Au regard de la nouvelle proposition de loi visant à réglementer la profession, je me permets de vous écrire afin d’avoir votre avis sur la nouvelle réforme fiscale 2025 notamment sur la partie concernant les chambres d’hôtes. En effet, le texte prévoit, entre autres, de réduire l’abattement fiscal actuel de 71 % à 50 % et le plafond microentreprise de 188 700 € à 77 700 € de chiffre d’affaires : ce qui serait, à mon sens, catastrophique pour tous les acteurs de chambres d’hôtes et avorterait mon projet en cours.»
Et pendant ce temps-là, selon un article de l’Opinion en date d’hier, je cite : « La nouvelle loi a été saluée par les représentants des hôteliers qui y ont vu une réponse équilibrée aux besoins de nos concitoyens et aux impératifs économiques du secteur de l’hôtellerie. » Est-ce qu’un hasard… 🙄
Enfin, si on regarde du côté d’Airbnb, la société au plus de 7 millions d’annonces dans le monde, dit regretter ces restrictions, mais je cite : « Nous n’anticipons pas d’impact notable de ces mesures sur notre activité. » Reste à savoir combien de villes se saisiront de ces nouvelles possibilités, alors que jusqu’à présent, seules 350 communes ont imposé des restrictions, sur les 4 000 qui le pouvaient, selon un décompte d’Airbnb.
Et vous, quel est votre sentiment ?
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2 commentaires
1000 % d’accord avec votre analyse sur le projet de texte de loi …
voir mon article sur ma page facebook qui va dans le même sens que le votre.
https://www.facebook.com/moulindeBuffiere/
encore une fois les petits porteurs de projets qui essayent de se constituer des compléments de revenus (souvent des retraites) seront les plus impactés et pourtant ils représentent une goutte d’eau dans le paysage touristiques Français !
j’ai personnellement eu une maison d’hôtes pendant 11ans, j’exploitais en société, c’était le revenu principal de notre couple… les propriétaires dans ce cas là ne seront pas concernés par ce projet ce qui est aberrant !
quels moyens avons nous pour réagir et empêcher l’adoption de ce texte ?
Bonjour Dominique,
Je partage entièrement votre ressenti concernant les impacts disproportionnés que ce projet de loi risque d’avoir sur les petits porteurs de projets, qui ne constituent, comme vous le dites, qu’une infime part du paysage touristique français. En ciblant prioritairement ces exploitants de chambres d’hôtes ou de petits meublés, souvent retraités ou cherchant un complément de revenu, on s’éloigne du problème central. Ce texte semble méconnaître les réalités du terrain et surtout, il pénalise des activités de proximité qui participent à l’authenticité et à la diversité de notre offre touristique.
L’ironie, bien sûr, est que les propriétaires qui, comme vous l’avez expérimenté, ont fait de cette activité leur revenu principal et qui l’exploitent en société ne seront pas impactés par la loi – alors qu’ils constituent des structures plus établies et aux répercussions plus concrètes sur le marché. Ce décalage réglementaire soulève de véritables questions sur la cohérence et l’équité des mesures envisagées, alors même que nous souhaitons un cadre plus inclusif, ajusté aux besoins de l’ensemble des acteurs du tourisme indépendant.
Pour réagir et peser dans le débat, la première étape est la sensibilisation, comme vous le faites avec votre article. Il est également crucial de mobiliser les réseaux professionnels, les associations d’hébergeurs indépendants et, plus largement, d’interpeller les instances locales et nationales en charge du tourisme, afin de faire valoir la spécificité et la diversité de nos activités. La concertation, le dialogue et des actions collectives peuvent encore faire entendre notre voix pour obtenir un cadre législatif qui prenne réellement en compte la diversité des projets touristiques et leur apport pour nos territoires.